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Véronic Dicaire et Michaël Gregorio se confient sur le mystère de leur voix

Dans sa voix, il y en a une centaine d’autres. Et si, finalement, c’était elle, Véronic Dicaire, la plus grande chanteuse du monde? Et si Michaël Gregorio était plus fort à lui tout seul que Freddie Mercury et Johnny réunis? Les deux imitateurs, reine et roi de la performance vocale, lèvent le voile sur les mystères de leur voix, cet organe fragile et fascinant… Sortir du silence est encore plus difficile que d’être dans le silence “

Véronic, vous vous souvenez de votre toute première imitation?

C’était dans la cour d’école. Chez nous au Québec, il y avait une émission à sketches et je m’amusais à imiter, vers 10 ans, l’un des personnages, une vieille dame. Je la faisais tellement bien qu’une enseignante m’a demandé de jouer ce personnage-là pour le spectacle de fin d’année. C’est vraiment le plus lointain souvenir d’imitation précise que j’ai. Sinon, je m’amusais toujours dans la cour d’école à imiter les enseignants, j’étais très taquine.

Et à quel moment commencez-vous à imiter les plus grandes chanteuses?

En 2002, quand j’ai sorti mon premier album. Je m’amusais en répétition, pendant les balances de mes spectacles, à faire quelques imitations pour faire rire les techniciens. Mon Rémon (son manager et compagnon de longue date, NdlR) m’a suggéré de faire deux ou trois imitations pendant le spectacle. Et j’ai reçu une très bonne réaction du public. Puis, quand je faisais la première partie de Robert Charlebois, c’est lui qui m’a suggéré de chanter «Bonne fête» avec la voix de Céline Dion ou de Marie Carmen, une chanteuse très connue chez nous. Robert me coachait. C’est après ça que l’idée a germé… enfin, surtout dans la tête de Rémon plutôt que dans la mienne. Moi, je ne me trouvais pas drôle du tout, j’avais vraiment le syndrome de l’imposteur, je n’étais pas humoriste. Et on catégorisait beaucoup les imitateurs en humour. Je ne suis pas totalement d’accord avec ça… C’est de l’humour mais c’est beaucoup plus du show. Rémon m’a après expliqué que mon choix de carrière devait peut-être être celui de chanteuse-imitatrice, parce que j’étais la seule et que je serais capable de faire tout ce que j’aime: chanter et danser, faire rire les gens,... Et en 2007, ça a démarré. Je voulais développer mon créneau, ne pas être dans la vanne mais dans la performance.

Vous ne vouliez pas vous moquer de ceux que vous imitez…

Non. Je me suis toujours dit que si demain je me trouvais par exemple en face de Vanessa Paradis et qu’elle me demandait de l’imiter, je devais avoir le courage de le faire. C’est important pour moi de rendre hommage à ces chanteuses plutôt que de me moquer d’elles.

Vous aviez entamé une carrière de chanteuse. Quand vous bifurquez vers l’imitation, vous apprenez à maîtriser votre voix autrement, vos entraînements changent?

Oui, absolument. Quand j’ai commencé l’imitation, avec ma coach vocale, on a changé la méthode de vocalises. On allait beaucoup vers la légèreté, la flexibilité des cordes vocales.

C’est plus dangereux pour votre voix d’en imiter d’autres?

C’est plus périlleux. Il y a eu un moment où j’avais attrapé la grippe et j’ai dû annuler un spectacle. J’étais capable de chanter, dans les balances de son, avec ma voix. Mais faire des imitations, je n’y arrivais pas.

Vous avez déjà perdu la voix?

Oui, ça m’est arrivé. Ça arrive dans des moments de fatigue, de surmenage.

Mais perdre la voix, c’est quoi exactement pour une chanteuse?

C’est dans l’amplitude de ta voix, quand tu es incapable d’utiliser les graves et les hauts. Tu ne parles ou ne chantes que dans une position précise sur tes cordes vocales, tu sais juste sortir le son. Et quand on force là-dessus, ça crée un stress. Et en forçant, on peut encore plus abîmer la voix, c’est comme un muscle enflé sur lequel on ne peut plus faire de sport. Il doit se reposer. Donc quand ça arrive avec ma voix, je la repose et j’ai aussi quelques remèdes de grandmère avec du thym, du miel,… Mais le meilleur truc, c’est le repos.

Le repos, cela signifie ne plus parler du tout?

Je le faisais mais je me suis rendue compte que sortir du silence est encore plus difficile que d’être dans le silence! Donc, je préfère faire doucement mes exercices de voix et continuer à parler tout en essayant de garder ma voix la plus libre possible sans trop m’angoisser là-dessus. Mais c’est vrai qu’il y a des fois où ça fait du bien de se taire! (rires) J’accepte bien le long silence. Le silence ne me fait pas peur du tout, alors que j’adore parler.

Quand vous enchaînez les spectacles, votre hygiène de vie doit donc être irréprochable…

Dans ces périodes-là, je fais attention, je ne fais pas d’excès. Je mange bien, je fais du yoga, je me lève tard et je vais me coucher directement après le spectacle… Le repos, toujours le repos pour essayer de récupérer la voix au maximum.

Quelle est l’imitation dont vous êtes la plus fière?

Je pense que c’est Whitney Houston. Parce que sa voix est tellement loin de moi. Elle a une voix de gorge, soul. Moi, pas du tout, j’ai une voix claire. C’est la voix la plus exigeante dans mon spectacle. Ça me donne une miniangoisse chaque soir (sourire)!

Est-ce que vous chantez néanmoins beaucoup avec «votre» voix, cette voix claire? On en entend d’ailleurs un petit bout dans votre spectacle…

Oui, parce que c’est super important de chanter avec ma voix, c’est la base de tout. J’adore d’ailleurs chanter avec ma voix, sans prétention. Je me fais des petits bilans vocaux et c’est plaisant de voir qu’avec l’imitation ma voix est encore plus développée.

Est-ce que quand on sait imiter les plus belles voix du monde, on devient la meilleure chanteuse du monde?

(rires) Non, mais je pense que je suis la chanteuse qui a le plus de tubes au monde…Parce que je ne chante que les hits de ces chanteuses!

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Michaël, quand avez-vous compris que votre voix pouvait en cacher d’autres?

C’est difficile à dire parce que ça n’a pas été un déclic. Il ne s’est pas passé quelque chose. C’est plein de petits signes. Au théâtre quand j’étais au lycée, je me suis rendu compte que je pouvais jouer avec ma voix, la modifier, mais je ne savais pas que j’allais en faire mon métier. Et dans ma petite enfance, j’avais tendance avec mes pleurs à réveiller les immeubles! (sourire) On m’avait surnommé «Caruso» apparemment. Je me souviens aussi que je reconnaissais les voix des différents comédiens de doublage dans les films pour enfants. J’étais attiré par la musique et la voix. Depuis tout petit, ça me fascinait. Puis, j’ai commencé à m’y intéresser un peu plus. J’ai commencé à apprendre à chanter comme mes idoles, Thom Yorke ou Kurt Cobain, j’essayais aussi de chanter comme les chanteurs de comédies musicales, Daniel Lévi etc... Tout est venu petit à petit.

Mais vous avez pris des cours pour apprendre à chanter comme d’autres?

Je n’ai pas vraiment pris de cours de chant tout de suite. C’est beaucoup de bricolage. Ce que je fais, c’est très personnel. J’avais déjà commencé à jouer mon premier spectacle et c’est là que j’ai eu besoin de prendre une dizaine de cours de chant, afin de tenir le rythme. Ça a mis un peu de technique sur beaucoup de bricolage. Mais ce que je fais parfois, c’est aller à l’encontre de la technique de chanteur puisque je mets de la contrainte à ma voix pour la faire résonner un peu différemment. C’est complémentaire mais parfois ça peut aller à l’encontre du travail vocal.

Au risque de vous blesser la voix?

Oui, le risque c’est celui-là.

Quel est votre travail au quotidien pour, justement, entretenir votre voix?

Alors, ce n’est pas une ascèse, ce n’est pas une vie ascétique mais il faut effectivement faire très attention. Il y a deux ans, j’ai eu de gros problèmes, j’ai dû me faire opérer, et pourtant je faisais déjà attention. Mais c’est normal, vu ce que je fais à ma voix: je lui rentre dedans. Donc, parfois, ça casse. L’essentiel du travail c’est le repos: vocal et bien dormir, même si en tournée, avec les transports, ce n’est pas évident. Mais il faut le moins possible solliciter la voix pour être en forme.

On dit que vous avez 150 voix. Mais vous répondez «je n’en ai qu’une seule!»

Et je dois la préserver. Quand je perds ma voix, je n’en ai pas 149 autres pour la remplacer. Après, j’essaie de ne pas être précautionneux, mais je me dois d’être en forme quand le public vient me voir.

Au-delà du travail vocal, vous devez aussi vous imprégner de la personne que vous imitez…

Et c’est le travail le plus important, celui d’acteur. Pour moi, ce qui donne de la rondeur, de la justesse aux imitations, c’est l’interprétation. Quand j’entends des imitateurs, je suis bluffé par eux parce que je me trouve moins fort mais je me trouve par contre bon interprète. On parle beaucoup du travail de la voix parce que c’est ce qui fascine les gens, ce qu’ils retiennent, mais il y a le travail d’écriture aussi. C’est très important.

Comment justement réussir l’interprétation?

On lit, on regarde des interviews, des concerts,… C’est aussi des émotions, ce que vous ressentez en entendant ces chanteurs-là et essayer de les transmettre. Je ne me prends jamais pour les gens que j’interprète. La touche humoristique est là pour mettre cette distance.

Cela vous arrive parfois de ne pas parvenir à prendre la voix d’un chanteur?

Oui, mais parfois ce n’est pas question de voix. Cela peut juste ne pas rentrer dans le spectacle. D’ailleurs, je ne me dis jamais que j’ai la voix d’untel ou d’untel, c’est un tout avec le spectacle.

Mais on doit aimer le chanteur qu’on imite?

Pas forcément. D’ailleurs, quand vous aimez trop un artiste, parfois c’est trop compliqué pour le retrouver parce que vous n’êtes pas satisfait. Tandis que si vous êtes plus détaché, vous aurez plus facilement accès à la parodie. Mais c’est sûr que quand vous avez écouté un chanteur toute votre vie, vous êtes déjà imprégné de sa voix.

Et la question qui tue: est-ce qu’à force d’imiter autant de chanteurs rock ou d’opéra vous ne seriez pas devenu le meilleur chanteur du monde?

Non jamais! (rires) Je suis d’ailleurs incapable de chanter un vrai opéra avec ma voix pendant deux heures. Il faudrait que j’arrête complètement de chanter autre chose et que je commence à travailler ma voix de manière opératique.

  • En détails 

Véronic Dicaire «Showgirl Tour» : 24 janvier 2023 Charleroi – Dôme 25 janvier 2023 Liège – Le Forum Infos et réservations: ticketmaster.be

Michaël Gregorio «L’odyssée de la voix» : Jeudi 30 mars 2023 – 20h00 Bruxelles – Forest National Infos et réservations: gracialive.be

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