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Mustii nous parle de la maladie de son oncle : « C’était pesant d’avoir quelqu’un de proche qui était si loin »

À 31 ans et quelques rôles marquants à son actif, Thomas Mustin, alias Mustii, publie enfin son 2e album sur fond d’un drame familial qui l’a longtemps perturbé: la schizophrénie de son oncle.

Il l’exorcise ici mais assure que «le but n’est pas de raconter l’histoire de ma famille, mais que chacun puisse se retrouver dans le parcours d’un individu qui veut entrer en contact avec les autres». Comme le fait Mustii, à travers son (ou plutôt ses) art(s). Même son style vestimentaire raconte quelque chose. Et en fera rêver beaucoup...

L'histoire que vous racontez dans cet album, «It's Happening Now», est celle de votre oncle, schizophrène, qui s’est donné la mort il y a plusieurs années. C'est donc un album qu'on imagine pas facile à créer car le sujet est très sensible...

C’est surtout pour mon père que c’est fragile. J’ai mis du temps avant d’oser lui en parler. Au départ, j’étais un peu flou, je lui disais que j’allais parler de maladies mentales, sans mettre le visage de mon tonton Michel dessus. Ça a pris du temps avant d’assumer auprès de mon père. Et à un moment, j'ai mis les pieds dans le plat. Mon père n’a pas eu de réaction négative mais juste un peu d’interrogation sur comment j’allais parler de Michel en musique. Je suis parti d’une image, d’une histoire, j’ai écrit tout avec ce que je sais de lui, les souvenirs que j’en ai, avec pour finalité de lui rendre hommage et de pouvoir connecter avec lui. Parce que je n’ai jamais pu vraiment connecter avec lui, c’était impossible.

Dans votre famille, on en parlait de sa maladie?

J’ai des souvenirs d’ado où je le voyais comme un être à part, vraiment un alien. J’ai plongé dans les journaux d’ado de mon père et j’ai chopé des choses dedans. Et puis, dans les discussions que j'ai eues avec mon père qui, lui, a vu le changement chez Michel qui était extraverti à l’adolescence et qui, tout à coup, vers 17 ans —car c’est généralement vers cet âge-là que la maladie se déclare—, a basculé. Mon père a alors vu son frère partir complètement.

Vous compreniez, jeune, de quoi il souffrait?

Non, je comprenais qu’il avait quelque chose mais je n’avais pas le bon mot. Je ne conscientisais pas, je voyais qu’il était malade mais je n’osais pas en parler à mes parents, et eux ne m’en parlaient pas énormément. Souvent, une fois par semaine le dimanche, on faisait un rassemblement familial, on allait manger chez mes grands-parents à Charleroi, où il a toujours vécu.

Vous évoquez Charleroi, où vivaient votre oncle et votre père. Et vous en avez gardé une image plutôt sombre…

Oui. C’est toute l’imagerie des alentours de Charleroi comme les no man’s land un peu, les terrils, où mon père et son frère allaient tout le temps à vélo. Mais moi, je vais rarement à Charleroi.

Votre oncle n’a jamais été interné?

Si, ils ont essayé de le placer, mais il fuguait. Pour lui, c’était impossible d'être enfermé. Quand mes grands-parents sont morts, mon père a dû faire un choix: il ne voulait pas laisser son frère seul, mais c’était impossible de le placer. Donc, Michel a fini sa vie seul dans l’appartement de mes grands-parents. C’était très compliqué pour mon père à gérer. Il vit toujours ça comme un échec, comme une faille, alors qu’il a respecté son frère dans ses choix. Mon oncle allait brûler de toute façon.

Avez-vous des souvenirs de son suicide?

J’ai peu de souvenirs. Mon père a mis du temps pour dire clairement que c’était un suicide. C’était resté flou, il y avait de la pudeur derrière.

Mais vous aviez et avez besoin d’en parler?

Oui. J’avais besoin d’exorciser ça. Je ne savais pas comment en parler, je me demandais si ça allait être mal pris dans ma famille. Et en même temps, le sujet m’intéresse, le développement mental m’a toujours intrigué. Mes parents, jusqu’à mes 18 ans, m’ont surveillé parce que cette maladie est héréditaire. Ils se demandaient si j’allais développer quelque chose. Moi je ne me suis pas posé la question. Mais c’était pesant d’avoir quelqu’un de proche qui était si loin. Ça m’a toujours perturbé, c’est comme si nos existences étaient passées sans se toucher à cause de la carapace autour, qui était sa maladie. Et moi, à l’époque, j’avais mon regard d’ado, un peu renfermé sur moi-même. J’étais dans mes problématiques d’ado, en plus réservé et timide. Et mon oncle était dans sa problématique de maladie mentale. C’est resté comme une frustration, surtout quand je vois mon père très marqué par cette histoire.

Un mot revient souvent dans l’album : « shame », soit « honte »…

Oui, c’est la honte que mon oncle ressentait, la perception qu’il avait pendant ses phases de lucidité où il se demandait comment se gérer, comment il était vu par les autres. Par moments, il était totalement renfermé et, à d’autres, il était totalement euphorique. C’était les montagnes russes, c’est ça que j’ai voulu retranscrire en musique.

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