L’origine du Maitrank se perd littéralement dans la nuit des temps puisque sa première mention remonte à… 854 lorsqu’il est décrit pour la première fois par le moine Wadalbert de Prüm. En vieux haut-allemand, son étymologie est la même encore aujourd’hui. Il était alors appelé «meiowîn», soit le vin de mai, tandis que «maitrank» peut être traduit par «boisson de mai» en francique mosellan. À l’époque, il était courant de contrebalancer l’acidité d’un vin en y faisant macérer des fruits ou des plantes pour lui adjoindre une saveur sucrée mais aussi profiter des vertus médicinales des fleurs telles que l’asperula odorata aux propriétés antispasmodiques, sédatives et antiseptiques. À l’origine fabriqué par les moines, le Maitrank devait donc être un remède avant d’être une boisson apéritive.

Car ce vin aromatisé est très clairement une boisson saisonnière puisqu’on y fait macérer notamment ces inflorescences d’aspérules odorantes, une plante qui fleurit dans nos régions de mai à juin. Par ces jolies fleurs blanches, on la surnomme Petit Muguet ou Reine-des-Bois. En Allemagne, on en fait un sirop que l’on mélange à la bière Berliner Weiße. L’aspérule odorante partage avec la fève tonka une haute teneur en coumarine, une substance aromatique qui amène ces effluves de vanille, de foin et d’amande.

À chacun sa recette

Il n’existe pas vraiment de recette unique du Maitrank, chacun y allant de sa petite popotte personnelle et chaque famille arlonaise gardant jalousement son secret de fabrication. Il exige néanmoins quatre ingrédients de base sans lesquels il est impossible d’en préparer: un vin blanc sec de la Moselle luxembourgeoise, de l’aspérule odorante, de l’orange et du sucre. Le vin doit être généralement jeune et acide. À Arlon, la confrérie du Maitrank utilise de l’Elbling, mais cela peut tout aussi bien être du Rivaner ou du Riesling. L’aspérule odorante doit, quant à elle, être cueillie juste avant sa floraison afin d’en garder toute sa force gustative. Chaque année, Arlon organise ses Fêtes du Maitrank le dernier week-end de mai. Et on peut facilement trouver du Maitrank en grande surface via Feller, mais la marque est devenue… limbourgeoise à la veille de l’an 2000.

La recette du Maitrank

Ingrédients :

• 6 litres de vin blanc luxembourgeois au choix (Elbling, Rivaner, Riesling, etc.)
• 27 cl de Cognac
• 50 cl de Porto blanc
• 750 gr d’oranges bio
• 2,5 citrons bio
• 525 gr de sucre fin
• 40 gr d’aspérule odorante

La préparation :

1. Lavez délicatement l’aspérule odorante et placez-la dans un récipient se fermant hermétiquement.
2. Ajoutez-y les citrons et les oranges coupés en rondelles.
3. Versez le vin blanc, le porto et le Cognac, et terminez par le sucre fin.
4. Laissez macérer pendant 36 à 48 heures, selon votre goût, puis filtrez le liquide à travers une serviette.
5. Dégustez enfin dans un verre froid garni d’une rondelle d’orange.

Le Maitrank peut se conserver près de trois semaines au frigo, mais ne se bonifie pas avec le temps. Il doit en tout cas se servir bien frais. Pour cela, certains n’hésitent pas à congeler les rondelles d’oranges utilisées lors de la macération en guise de glaçon.