Entre la Belgique et le Québec, il y a certes un océan mais, avec Véronic Dicaire, il n’y a qu’un pas. Bête de scène et monstre de générosité, au point où, parfois, elle se sente «trop bonne, trop conne», nous dit-elle dans un large sourire, l’artiste aux mille voix sera bientôt de retour dans cette Belgique qu’elle aime tant avec un nouveau spectacle.
D’ici-là, elle nous dévoile qu’elle-même est inimitable… en cuisine.
Véronic, on vous demande souvent comment vous choisissez les voix que vous imitez. Mais comment choisissez-vous celles que vous retirez à chaque nouveau spectacle?
C’est le cas maintenant parce qu’on a renforcé le côté contemporain du spectacle. J’ai retiré Christine&the Queens, que j’aimais pourtant, pour ajouter des phénomènes nouveaux. Le choix d’enlever une imitation, c’est une question technique. Souvent, c’est au niveau des notes, de l’enchaînement en musique. Donc oui, il faut retirer parfois des voix parce qu’il ne faut pas jouer au chien savant. Quand on est trop dans la générosité, au bout d’un moment, ça écoeure. Il faut qu’on soit futé dans nos choix et dans notre timing. On ne va pas faire se succéder des imitations de 30 secondes, je trouverais ça «plate» (ennuyant, en québécois) parce que la magie de l’imitation c’est de se laisser embarquer juste au bon moment et là, l’imitation s’arrête. Juste au moment où le public se dit: «allez, j’en voulais plus!» (sourire).
Vous aimez toutes les voix que vous faites, mais est-ce que vous aimez toutes les chanteuses qui se cachent derrière?
Je pense que je suis plus amoureuse des voix que j’imite. Je ne suis pas certaine que j’aime tous les «produits». Ces voix ont un bagage tellement intéressant, surtout quand tu te mets à analyser la voix, que tu fais des recherches dessus, tu vas voir l’artiste que tu imites en interview, sur scène,… Quand je m’accroche à une voix, je m’accroche au tout. Mais la personnalité comme telle, ça ne m’intéresse pas tant.
Et quand vous rencontrez ces chanteuses «en vrai», ça finit par influencer votre manière de les imiter?
Peut-être que ça appuie encore plus le respect et l’amour que j’ai pour elles.
Pas l’inverse?
Non. Jusqu’à présent, ça ne m’est jamais arrivé d’être déçue, de me dire «oh la maudite, je ne l’imite plus!» (rires) Mais je suis très naïve, j’ai foi en «le bon humain»!
Vous vous dites «naïve». Mais est-ce que c’est encore possible de l’être après une dizaine d’années dans le showbiz?
Je veux encore garder cette petite naïveté-là, sinon quand on comprend trop notre métier, on embarque trop dans le mauvais. Et ça, je le laisse à Rémon (son manager et compagnon), volontairement. Je ne veux pas savoir sinon je perdrais l’envie de le faire, je perdrais le beau de mon métier, le bonheur de le faire. Encore plus aujourd’hui, par ce qui se passe dans le monde, avec toute cette lourdeur autour de nous, mon rôle est important: faire oublier leur quotidien aux gens. Maintenant, ce n’est plus drôle quand je dis «je suis une chanteuse de guerre», c’est vrai! Je me sens encore plus dans cette mission de faire plaisir aux gens.
Une mission, vraiment?
J’ai toujours voulu donner du beau, du fantastique aux gens. Alors oui, c’est sûr qu’on apprécie quand on se fait applaudir. Mais le premier déclic pour moi, c’est quand je fais rire les gens, que je les touche. C’est là que je sens que c’est ma mission.
Pour avoir depuis 10 ans réussi à remplir votre mission de chanteuse et imitatrice, quelle a été votre plus grand atout, en dehors de votre talent vocal?
C’est difficile de dire ça de soi… Mais je pense être une personne très généreuse dans ce que je suis. Peu importe avec qui je suis, que je sois sur scène. Je ne suis pas dans la générosité matérielle mais dans le don de soin, je pense que je suis très, très volontaire! (rire) Ce qui parfois n’est pas une qualité…
Vous vous épuisez vous-même parfois?
Parfois, je me dis: «Véronic, c’est pas ton problème, pourquoi tu vas aider untel ou untel». Mais je suis comme ça, je veux aider.
Mais pourquoi s’excuser d’être gentille?
Parce qu’à un moment donné dans mon parcours, je pense que des gens me trouvaient conne parce que j’étais trop gentille. Tu vois l’expression «trop bon, trop con»? C’est un peu moi. Je m’en suis rendu compte en France, parce que je ne disais pas «non». Il y a une expression en anglais qui dit: «tue-les avec de la gentillesse» et ça, c’est ma devise.