Arnaud, le Liégeois de Top Chef, va en finale : « C'est l'épreuve d'une vie ! »

Crédit photo : Xavier Janssens

Arnaud Delvenne, le dernier candidat belge de cette saison de «Top Chef» vient d'obtenir sa place en finale. Nous l'avions rencontré il y a quelques mois, à l'occasion de l'ouverture de son propre restaurant, à Liège. Ce mercredi, il affrontera Louise lors de la finale. 

Il y a quelques temps, notre digne représentant à «Top Chef» ouvrait son restaurant, Nono, émotion et partage, chez lui, à Liège. Arnaud Delvenne nous recevait alors en plein préparatifs, sourire aux lèvres et excitation au cœur. Ce lieu raconte aussi le parcours de ce chef tatoué, sensible et attachant.

Le restaurant que vous venez d’ouvrir s’appelle Nono, un nom chargé de symboles…

Ça a été une évidence. Ce nom me rapproche de ma maman (décédée, NdlR), qui m’appelait comme ça. Mais ça n’avait rien à voir avec l’Italie, c’est parce que je ne pliais pas les genoux quand j’étais petit, je marchais comme Nono le petit robot! Et j’ai un amour pour la cuisine italienne et le «nono» dans une famille italienne, c’est celui qui rassemble, qui fédère. Quoi de mieux que ce nom-là pour créer quelque chose autour de l’émotion et du partage? C’est ce que veut ce restaurant.

La cuisine italienne, c’est ce que vous avez, dans le fond, toujours voulu travailler?

J’ai été attiré par la cuisine italienne pour la simplicité du produit et la complexité du goût. Ce sont des produits que tu n’es pas obligé de travailler beaucoup pour les mettre en valeur. Pour moi, c’est la meilleure cuisine du monde! C’est la cuisine qui me ressemble le plus en fait: simple et à la fois complexe dans les goûts.

Alors, c’est quoi votre plat préféré?

Les pâtes…bolognaise. Au ragoût en fait. Je trouve ça exceptionnel: quelque chose qui a mijoté, une bonne viande, des légumes, des pâtes, un peu de parmesan et l’affaire est faite! (sourire)

Ce sera votre plat «signature»?

(rires) Non, c’est une soupe de parmesan. C’est quelque chose de très simple mais je ne veux rien jeter, c’est fait avec les croûtes de parmesan, des oignons blancs et un peu de pommes de terre, un peu de crème et des fonds de volaille. C’est quelque chose de réconfortant. C’est ça que j’aime quand je mange.

Crédit photo : Xavier Janssens

Depuis combien de temps l’imaginiez-vous ce restaurant?

C’est un projet qui m’a été proposé avant même que «Top Chef» ne se dessine. Je travaillais encore à l’hôtel Van der Valk de Liège. J’ai dit «oui» à la proposition parce qu’Albert, qui est mon associé aujourd’hui, m’avait déjà aidé dans le passé pour mon premier restaurant. C’est un retour honnête des choses de faire quelque chose qui peut fonctionner, qui est agréable pour nous deux. Je voulais vraiment retrouver ce goût de la chère, ce toucher, retourner en cuisine.

Et être réellement votre propre chef?

Oui, voilà. Dans ma tête aussi c’est complexe: je n’aime pas trop les règles. Je les suis mais je ne les aime pas! Je n’aime pas trop l’autorité non plus, c’est pour ça que j’ai arrêté à l’école, que j’ai eu beaucoup de problèmes. Avec mon frère, on était assez turbulents. Par contre, je me suis retrouvé agent pénitentiaire en prison, parce que j’aime avoir un cadre, mais je n’aime pas qu’on m’impose des choses. Et donc ici, à la base, on devait ouvrir un petit resto tranquille, un «salad bar». Et puis je suis parti à «Top Chef» et le projet a mûri.

Parce que «Top Chef» vous a fait voir les choses autrement? Surtout quand on a comme chef de brigade un talent comme Glenn Viel?

Oui. Et puis, ça m’a permis aussi de faire une introspection de ma vie. Je vais bientôt avoir 37 ans, ma maman est décédée à 43 ans. On met sa ligne de vie par rapport à celle de nos parents. La ligne de vie de ma maman était très courte. Donc, la mienne, de mon point de vue, est très courte aussi. Je me suis dit: «lance-toi!» Si je me plante, c’est pas trop grave, il sera encore temps de recommencer autre chose. Mais je ne vais pas me planter… j’espère! (rires) Je me suis très bien entouré d’une équipe formidable, tous jeunes, j’ai ma meilleure amie qui sera avec moi au quotidien et Albert qui sera ma structure parce qu’il faut me canaliser. Je suis beaucoup mieux entouré que quand j’ai lancé mon premier restaurant. C’est la maladie de ma maman qui m’avait décidé à ouvrir mon premier resto. Ça a périclité mais ce n’est pas grave. Après, on recommence. Celui-ci, j’espère que sera le début d’une belle histoire!

Qu’est-ce que vous avez appris dans «Top Chef» qui vous sera très utile ici?

Aller à l’essentiel, c’est ce que Glenn m’a appris. Et aller chercher à l’intérieur de soi. Pour moi, cuisiner ce n’est pas un métier, c’est une passion. En allant chercher dans les souvenirs, on fait une autre cuisine. On y met nos tripes. Si, aujourd’hui, j’ai la niaque et l’envie de réussir, c’est grâce à Glenn. Il a été un frère en fait, il m’a motivé, il m’a bousculé. Il m’a poussé dans mes retranchements. Par deux fois j’ai failli baisser les bras.

Vos débuts dans «Top Chef» n’étaient pas faciles…

On peut dire que je suis passé entre le timbre et l’enveloppe! (sourire) Mais à force de détermination…

Un restaurant, c’est aussi une atmosphère, une déco…Ici, c’est plutôt végétal, il y a aussi beaucoup de bois…

Je n’aimais pas la nature quand j’étais petit…D’ailleurs je pense que quand mon père va lire tout ça, il va rigoler! J’étais hyper réfractaire aux balades. Mais maintenant, j’habite à la campagne. Les matières naturelles ici vont raconter exactement ce qui va se passer dans l’assiette. Il fallait que tout soit en harmonie.

Si aujourd’hui j’ai la niaque et l’envie de réussir, c’est grâce à Glenn Viel, mon chef de brigade dans «Top Chef »

Et il y a le logo aussi de Nono, avec ce chef à la casquette…

Quand j’ai vu le premier épisode de «Top chef», il y avait cette casquette et ces lunettes noires et je me suis dit: «pourquoi ne pas jouer là-dessus à fond?». Et, en plus, la casquette cache une très laide coiffure! (rires) Ça me permet de ne pas aller chez le coiffeur… Et puis c’est assez reconnaissable une casquette.

Vous êtes aussi identifiable par vos nombreux tatouages…

J’en ai une trentaine. J’ai commencé très tard à en faire, il y a 4 ans. J’étais toutes les semaines chez le tatoueur. Je voulais que chaque tatouage raconte une histoire. Le premier a été l’aigle, il est royal, beau et survole les gens, les examine. Puis, j’ai eu le tigre. Il y a le hibou aussi, parce que ma maman m’appelait «le hibou» petit parce que quand je me levais le matin, j’avais deux épis sur le crâne et je portais de très grosses lunettes! J’ai aussi des sigles représentés, ce sont ceux que portaient ma maman en pendentif, j’ai aussi son signe astral… Et j’ai un «13» tatoué: c’est une «private joke» entre candidats de «Top chef». C’est Louise qui nous a tatoués à l’aiguille, comme en taule, un soir de guindaille là-bas!

C’est la folle ambiance à «Top Chef»! 

Je n’ai pas eu l’impression d’être à un concours. Pour moi c’était une colonie de vacances. C’était génial. «Top Chef», c’est l’épreuve d’une vie en fait.

Vous avez la crainte de vous planter avec ce restaurant?

On est toujours stressé de savoir si ça va plaire quand on met nos tripes dans une assiette. En plus, derrière, il y a une émission. Ça fait une dizaine d’années que les chefs deviennent plus médiatisés et je trouve que c’est un métier qui est trop bien perçu de par la télé. C’est un vrai métier, compliqué et je pense qu’il y a des jeunes aujourd’hui qui sont un peu floués par l’image que la télé peut refléter. C’est un métier où on doit se donner corps et âme tous les jours, où on ne dort pas beaucoup, où on réfléchit. Je pense que «Top Chef» va certainement changer les débuts de ce restaurant.

Mais la notoriété vous fait un peu peur?

Non parce que dans mon premier restaurant, j’étais déjà très présent en salles. J’adore le côté humain, discuter avec les gens. J’ai une cuisine ouverte car c’est une évidence, il n’y a rien à cacher!

Vous avez toujours eu cette forte personnalité?

J’ai toujours eu une très grande gueule. Mais mon caractère est plus affirmé aujourd’hui. Je pense qu’il faut assumer qui on est pour être quelqu’un d’humain.

Quand avez-vous compris que vous deviez assumer qui vous étiez? Vous avez été plutôt secoué en cuisine à cause de votre homosexualité…

Je ne m’en cachais pas mais je ne pense pas que c’était quelque chose dont j’étais fier. Au décès de ma maman, j’ai été vraiment hyper marqué, je le suis toujours aujourd’hui. J’ai compris que si j’avais la chance d’être en vie, ça ne servait à rien de me cacher. On est énormément sur la terre et si tu ne plais pas à une personne, ce n’est pas grave, tu peux plaire à plein d’autres!

En cuisine, il y a encore cette image de virilité que certains voudraient rendre?

Oui. C’est un métier très hiérarchisé, où il y a toujours eu des hommes au pouvoir. Il y a des gens qui n’évoluent pas. Mais moi, je ne me cache pas. J’ai reçu par contre des messages sur Instagram de gens qui me demandaient pourquoi j’avais dit que j’étais homosexuel. Mais pourquoi pas le dire, en fait?

Vous avez aussi perdu énormément de poids. Cela a forcément influencé votre vision de la cuisine…

Oui, et mon regard sur les autres, sur moi-même. Quand je suis parti en Martinique, je me suis vraiment déplu physiquement –je ne me suis pas mis en maillot de bain pendant 10 jours! Comment je peux être dans une relation si déjà, moi, je ne me plais pas? J’ai appelé ma chirurgienne pour savoir si on pouvait faire quelque chose. J’avais peur de ne plus pouvoir m’amuser. J’adore vraiment manger, c’est ce qui régit ma vie! Quand je pars en vacances, si je ne mange pas bien, mes vacances sont gâchées. Je suis donc revenu de Martinique en janvier l’année dernière, et en avril je me faisais opérer. Sept mois après, je suis hyper heureux! J’ai perdu 50 kilos, même si les trois premiers mois ont été une catastrophe. Mais la vie reprend, un peu différemment. Je dois faire attention au sucre, à l’alcool, au gras,…Et forcément, ça influence ma cuisine aujourd’hui. Elle sera plus poisson, plus légumes, avec pas trop de matières grasses animales.

Crédit photo : Xavier Janssens

Quand on arrive à «Top Chef» en voulant faire une cuisine moins grasse, c’est facile à faire passer?

Non, pas du tout. La cuisine française a ses codes: beurre, crème, bouillon. C’est une cuisine qui peut être légère, mais riche. Et puis, c’est ce qu’on nous apprend à l’école. Je ne suis pas encore à l’extrême de ce que je pourrais faire parce qu’il faut aussi plaire à la clientèle. Un restaurant doit être en osmose avec tout le monde. Mais qu’on ne se tracasse pas, je vais pouvoir refaire des épreuves tous les jours si les clients me le demandent! (rires) J’ai enlevé le beurre, et j’ai la meilleure huile d’olive du monde!

Le bon plan d’Arnaud

Occhiolino

Guillaume Duchesne, un jeune entrepreneur liégeois, produit l’huile d’olive Occhiolino à partir d’une oliveraie dans les Pouilles. C’est celle choisir par Arnaud Delvenne. De même qu’un limoncello, du même producteur. «Son limoncello ne ressemble pas à du Mr Propre, il n’est pas phosphorescent, tu n’as pas mal à la tête le lendemain et tu ne fais pas de crise d’hypoglycémie! Ça sent le citron, et pas l’alcool. On va travailler cet apéritif avec et sans alcool. C’est en lisant un article sur Guillaume Duchesne dans «La Meuse» que je l’ai découvert. Il est jeune, dynamique. On s’est tout de suite bien entendu».

occhiolino.be

En détail

Nono

Place du Vingt-Août 22, 4000 Liège

Tél: 04/ 272 30 50

Infos: reservation@nonoresto.be

nonoresto.be